Scène d'ouverture
Hervé et Jean-Claude sont devant la machine à café.
Jean-Claude: C'est beau chez moi, maintenant; j'ai tout refait, hein. La salle de bains, la cuisine, le salon! J'ai mis des colonnades, ça a d'la gueule! Pfff....
Hervé, ironique: Oh ouais ça doit être chouette, ouais.
Jean-Claude: Ouais, j'ai tout refait avec mes mains, même le jardin et le garage.
Hervé: Tout, tout seul?
Jean-Claude: Ouais.
Hervé: Et ta femme?
Jean-Claude: Ah ça, j'ai pas touché, ça.
Scène 1
Jean-Guy, Carole et Jean-Claude sont devant la machine à café. Jean-Guy se commande un café.
Carole: Je sais qu'on a besoin de mètres carré supplémentaires mais de là à nous envoyer au trou du cul du monde...
Jean-Guy: Oh, c'est pas le trou du cul du monde! Y'a un arrêt de bus à deux pas!
Jean-Claude: Oh bah, vous faîtes de grandes enjambées Jean-Guy!
Carole: Ah oui, on a fait le trajet l'autre jour avec Jeanne, on a mis...vingt minutes.
Jean-Claude: Sans compter qu'elles ont failli se faire aggresser deux fois. Il lui fait un clin d'oeil
Jean-Guy: Là, je vous arrête tout de suite. L'entreprise n'est pas responsable de la dégradation du lien social dans les banlieues.
Carole: Voilà, banlieue! C'est ça qu'on voulait éviter Jean-Guy, la BANLIEUE!
Jean-Guy: Mais on n'est pas dans la banlieue, on est en Q.H.P.D.: Quartier à Haut Potentiel de Développement. Et ce n'est pas un hasard si le grand architecte arménien Jacky Nervourian a accepté de concevoir l'ensemble de nos bâtiments.
Jean-Claude: Ouais, ça c'est sûr que question exode, Nervourian y doit s'y connaître, hein.
Jean-Guy se dirige vers la maquette des bâtiments située derrière sur une des tables.
Jean-Guy: Vous avez vu la maquette? Les locaux sont superbes!
Scène 2
Ils sont tous les trois autour de la maquette.
Carole: C'est désert, y'a pas un magasin à moins de cinq minutes.
Jean-Claude: Exactement, y'a même pas un arabe.
Jean-Guy: Ah, si! Des arabes, y'en a, mais ils n'ont pas de magasin. Gros plan sur Jean-Claude, puis sur Jean-Guy. En tout cas, ça permettra peut-être à certains de respecter la pause-déjeuner et de revenir avant 15h00, en particulier pendant la période des soldes.
Jean-Claude: Ça, ça c'est moche ce que vous dîtes Jean-Guy.
Carole: Quand je pense au temps que je consacre à cet entreprise.
Jean-Claude: Ouais exactement, on a même plus le temps de faire notre tennis.
Jean-Guy: Ah, vous allez faire du jogging. On est en pleine nature, le grand air c'est vivifiant.
Jean-Claude: Hmm, tant qu'le vent soufflera pas de l'ouest.
Jean-Guy: Comment ça?
Jean-Claude: Y'a une usine d'incinération de farine animale à moins de 5 kilomètres, plein ouest.
Carole: C'est Nervourian qui l'a construit. J'vous le dis moi, Jean-Guy. Si vous persistez, y'a de la démission dans l'air.
Jean-Claude: Ah mais moi, elle est pas dans l'air! Il pose violemment son café sur la maquette. Elle est sur votre bureau dès demain matin, Jean-Guy!
Jean-Guy: Alors là je tombe des nues, hein! Ça fait des mois qu'on négoicie avec le C.E. Pour ce déménagement, c'est aujourd'hui que vous vous réveillez?
Carole: Mais vous êtes marrant, on n'a pas une minutes à nous. On est cadre...
Jean-Claude: Eh oui! On a la pression.
Jean-Guy: Ah vous la pression, Jean-Claude, vous l'avez surtout au bar!
Scène 3
Jean-Guy va se commander un autre café.
Jean-Guy: Je vous rappelle que nous avons cédé avec les cadres pour la prime à 10 000 francs, pour la voiture de fonction, pour les bureaux individuels...Vous ne voulez tout de même pas qu'on vous construise un pavillon devant la boîte?
Carole, le rejoignant: Attendez....Euh, Jean-Guy, vous avez dit la prime à 10 000 francs? Avec une voiture de fonction?
Jean-Guy: Evidemment, oui!
Carole: Ah, mais je n'étais pas au courant!
Jean-Claude, les rejoignant à son tour: On...on, on n'était pas au courant. On! On...
Jean-Guy: J'ai l'impression que la réunion d'information a eu lieu pendant les soldes et pendant Roland Garros.
Carole: Je suis vraiment désolée. Effectivement, ça change tout. J'avais complètemen zappé. Dites-moi, pour les sièges, on peut choisir? Non parce que moi, personnellement je suis très cuir.
Jean-Claude: Ouais...
Carole s'en va.
Jean-Claude: Moi aussi, j'aime bien le cuir.
Jean-Guy: Bien! Jean-Claude, la direction de l'entreprise regrette votre départ mais votre décision vous honore.
Jean-Claude: Oh mais bon...
Jean-Guy: Faut rester en cohérence avec soi-même.
Jean-Claude: oui, j'ai...j'ai le temps de réfléchir d'ici demain, aussi.
Jean-Guy: Vous n'êtes pas le genre de personne à brader vos décisions pour une vulgaire prime ou une banale voiture de fonction.
Scène de fermeture
Carole et Jean-Claude.
Carole: Bah Jean-Claude, vous n'aviez pas donné votre démission?
Jean-Claude: Ah, mais c'est qu'on m'a retenu! Ah, c'est le grand patron en personne qui s'y est oppposé. Ah, oui! Bon, y'a bien eu quelques mesures de rétortion....je devrais récupérer ma voiture de fonction bientôt, hein. A ce propos, est-ce que vous pourriez me déposer à l'arrêt de bus? Parce que là, j'ai regardé par la fenêtre, dis donc. Ça tombe, ça tombe...
Carole: Non.
Jean-Claude: C'est dommage parce qu'on se parle jamais et....
Carole: C'est ça qui est bien. Elle prend son café et s'en va.
Jean-Claude: T'en fais pas, tu perds rien pour attendre, toi.